[Presse] Après Nancy - Brest (0-2)

Sixième journée de Ligue 1, un mois et demi de compétition, après autant de préparation et la perplexité gagne du terrain à l'ASNL. Forcément l'impatience monte, voire l'inquiétude, devant des résultats en dents de scie. Si elle a depuis longtemps mémorisé la recette pour voyager fréquemment en classe business, cette équipe paradoxale ne sait toujours pas comment s'y prendre pour empoigner les mêmes adversaires dans un contexte jadis réputé plus confortable.
Car les explications manquaient au sortir de Picot, samedi soir. « On se pose des questions. On sait qu'on n'est pas loin, on va chercher la solution au fond de nous-mêmes », préconisait le capitaine Gennaro Bracigliano. Dans un autre registre, Pablo Correa admettait simplement : « J'ai du mal à expliquer, en dehors de l'efficacité. »
Cela reniflait la même impuissance que celle de ses attaquants. En disant cela, il refusait aussi les extrapolations faciles et tentantes, mais relevant souvent de la pure sagesse. Sur le système tactique, la psychose qui ronge son groupe, cette pelouse toujours à apprivoiser, ses choix de joueurs. En réduisant le débat à l'efficacité, l'entraîneur cherchait sans doute à couper court à la contagion, à éviter que le mal ne se nourrisse de lui-même. Car évidemment, c'est la répétition qui nuit gravement à la santé.
On peut effectivement mettre ce nom sur le mal nancéien à domicile. Efficacité, tout dépend de ce que l'on entend ainsi. Et puis, quand on a dit cela, on ne fait pas beaucoup avancer le schmilblic. Mais Correa a raison, les chiffres viennent d'ailleurs à son secours, Nancy s'est appuyé sur une meilleure possession et a tiré plus souvent au but. On peut faire le culbuto et se souvenir que des succès à l'extérieur ont affiché exactement les identifiants inverses.
Rappelons au passage que Brest avait encore le look siglé Ligue2. Mais passons. Les mêmes statistiques mettent surtout en évidence un gaspillage technique fâcheux sur les frappes hors cadre, les centres ratés, les coups de pied arrêtés négligés, les balles perdues.
Voilà qui est plus instructif, on veut parler du bagage nancéien sur le sujet. Tous les voyants sont au rouge, de quoi accréditer la thèse que Nancy ne s'acclimate pas très vite aux caractéristiques des matches à Picot. Qu'il s'y trouve mal à l'aise. Question d'appuis, de vitesse de balle, de rebonds, d'espace ? Personne ne s'aventure ouvertement dans ces « détails » analytiques. Et le fatalisme s'installe par ricochet. Il est bien entendu aussi dangereux que l'alarmisme.

En clair, l'ASNL n'a pas encore trouvé ses repères à domicile. Même si le sujet est tabou pour des raisons qui tiennent à l'intérêt supérieur, il faut bien admettre qu'il s'agit de s'adapter. Ce devait d'ailleurs être un avantage ; il est peut-être encore trop tôt pour le condamner, mais à un moment, il sera trop tard. Admettons que la marque nancéienne n'avait pas besoin de cela et que sa marge de sécurité n'est pas telle qu'on peut tolérer une grande tergiversation. Y compris d'ailleurs pour un public dont la reconquête constituait un objectif majeur de la saison. Cet échec a quelque chose de plus douloureux encore que le reste du panorama, si l'on se souvient que Jacques Rousselot en personne réclamait ce soutien comme l'indispensable socle à ses projets.
Ce matin, il s'arrache les cheveux. Après-demain face à Bordeaux, pour le compte de la Coupe de la Ligue cette fois, l'ASNL aura l'opportunité de tester d'autres options. On pense bien entendu d'abord à l'association Féret-Vahirua pour charpenter un milieu de terrain complètement débordé face à Brest. Jamais il n'a pesé sur le cours des événements. Plus que la valeur des joueurs qui le compose, c'est bien leur articulation qui a fait faillite.
Pour maîtriser un match, que ce soit pour le dominer territorialement ou non, Nancy a besoin de trouver dans ce secteur un équilibre. Le problème revient tous les quinze jours à la case départ. Correa lui-même l'a admis, de sorte qu'à cette heure, l'ASNL n'a pas d'acquis, ni de certitude. Sauf une : à un moment, cette double vie sera démasquée et les ennuis prendront une tout autre ampleur. Il est encore temps de se le dire courageusement.

Christian FRICHET